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le patro 1939-1945 par claude BARBIER

Le patro 1939-1945

 

Le patro c’est quoi ?

Comment en parler sans tenir compte d’une foule d’éléments. L’école, la famille, le contexte et l’évolution de la société à des périodes déterminées, l‘éducation et la formation spirituelle sportive humaine etc.

Quel a été son rôle, sans doute immense, son influence sur les mentalités et les comportements.

Raconter le « patro » c’est faire état le plus possible de faits pour essayer de comprendre pourquoi nous avons été,  momentanément ou définitivement, marqués par le patro.

Retrouver ce que nous avons dans la mémoire parmi les masses de souvenirs. Faire appel à ce que nous avons en chacun d’entre nous, même s’il faut tenir compte des facteurs affectifs qui peuvent travestir plus ou moins la réalité, est sans doute la meilleure réponse que l’on peut apporter à notre interrogation.

Le patro c’est quoi ?

Pour moi c’est avec le basket, les deux passions  que j’ai eu dès les premiers pas effectués dans la cour et dès le premier ballon que j’ai touché avec mes mains. Depuis j’ai eu la grande chance de pouvoir vivre cette passion sans discontinuité depuis 45 ans.

En effet étant né  en   1929 signant ma première licence en 1940 je n’ai pas connu d’autre club et je crois avoir participé intensément à l’évolution du patro de cette première année de guerre jusqu’à nos jours. (1985)

Pourquoi cette passion ? Existe-t’ il des causes qui ont fait de ces anciens, que l’on trouve dans tous les patros, des inconditionnels et des « dingues » de leur association et de leur sport ?

Revenir le plus loin possible en arrière, transcrire les souvenirs et les analyser pour essayer d’en comprendre leurs influences est sans doute la seule démarche qui permet de trouver certaines explications individuelles et collectives.

Il nous faut cerner le mieux possible le problème que nous avons tous, celui de revenir de longues années en arrière en ne faisant appel qu’à notre mémoire sans avoir de points de repère précis. Personnellement je voudrais profiter de l’occasion qui m’est offerte d’apporter mon témoignage qui me permet de dire tout ce que j’ai vécu au sein de ce patro qui représente une grande partie de mon existence et faire comprendre tout ce qui a pu, à travers les bons et les mauvais moments, influencer ma façon de vivre et de penser.

Pour moi le patro c’est ça.

Mes débuts

Le plus loin que je me souvienne remonte à l’avant-guerre de 1939. Ce sont des flashs plus que des souvenirs, et comme les vieilles photos jaunies par le temps, sont assez flous dans ma mémoire.

- Une séance de cinéma le jeudi après-midi chez M. GUITARD, cours d’Ornano où mon frère plus âgé avait dû m’amener

- Une équipe de basket un dimanche après-midi, sûrement les poussins de l’époque, très beaux, habillés avec des chaussettes longues de couleurs jaune et noire et des bonnettes tricotées aux mêmes couleurs.

- Les parties de ballon prisonnier, on disait alors le GOBU avec Pierre LAGARDERE qui était le « grand » de service auprès des jeunes et qui jouait avec nous comme avec des quilles. Il avait écrasé le nez d’un coup de ballon à mon cousin PILARD qui avait beaucoup saigné. Pierre LAGARDERE a été la première « idole » que nous avons eu.

- Une bagarre générale, dont je situe plus difficilement l’époque, entre deux équipes d’adultes sur le terrain de basket

Le cinéma, le basket, le jeu et les activités physiques, la bagarre … Peut-être les premières influences…  Mais je dois avouer que par la suite j’ai aimé tout cela

Au cours de notre première année de catéchisme, nous étions séparés en groupes. Le territoire paroissial était vaste et comprenait trois écoles laïques : Arlac, La glacière et Saint Augustin ; l’école privée Sainte Monique était ouverte aux filles seulement. La mixité n’existait ni à l’école ni au patro.

Chacun appartenait à un groupe constitué à partir de l’école où il allait.

L’Ecole

Bien plus que maintenant l’appartenance à l’une ou l’autre de ces écoles invoquait pour la majorité des élus un milieu social et des différences de pensées.

L’école de St Augustin était renommée plus sérieuse comparativement à l’école d’Arlac et de la Glacière. Ces dernières étaient situées en dehors de la ville dans des quartiers plus ouvriers et il y avait  surement  à cette époque passablement de cas sociaux ou de marginaux pour employer les termes actuels.

Arlac était la limite d’une zone dangereuse de par certains de ces habitants et il y avait comme à la Glacière pas mal de voyous. Nous y reviendrons…

Aux abords immédiats de ces deux quartiers,  des terrains vagues et de ce fait, ajouter à bien d’autres, il est certain que nous étions plus libres, non tenus par nos parents et dons plus disposés, que ceux de Saint Augustin, à faire des coups…

Nos bagarres entre groupes de la même école mais de quartiers différents étaient sérieuses et dangereuses «  frondes, carabines à plombs, batailles avec les mains ou à coups de pierres ou tuiles cassées. Existaient aussi les bagarres entre  ceux d’entre nous qui voulaient prouver leur supériorité … être le chef.

Les différences entre filles et garçons, les milieux sociaux, les mentalités et les comportements, entrainaient fatalement des oppositions et des rivalités. Tout ceci se répercuter partout où nous étions réunis  et même … . Le premier mouvement où nous avons participé au patro : » les cœurs vaillants ».

Il y aura sûrement beaucoup à dire et à écrire sur ces cœurs vaillants pour qui rien n’était impossible. C’était leurs devises. Mais auparavant il nous faut situer le cadre, les activités, les responsables de ce patro dont nous venions de faire connaissance à travers le catéchisme et les cœurs vaillants.

Le patro

Pour beaucoup d’entre nous, il fut d’abord un endroit privilégié où nous vivions au contact d’autres garçons que ceux de la classe, de plus grands que nous, d’adultes et de sportifs que nous considérions comme des champions.

Une structure d’accueil où durant les années difficiles nous nous réfugions très souvent pour se retrouver, jouer, discuter se rencontrer.

Il y avait une salle avec une scène qui faisait cinéma et de temps à autres des séances théâtrales.

Attenant à cette grande salle, une plus petite avec d’un côté le bureau de l’abbé et de l’autre un coin chapelle. Derrière ce bloc central, une cour avec des panneaux de basket. Sur le côté en prolongement de la grande salle, la bâtisse de l’école sainte Monique  dont le mur nous servait de fronton de pelote basque et plus en arrière une salle de gymnastique toute en bois avec à l’intérieur une barre fixe, des parallèles et une grande corde qui nous servait à jouer tarzan. Enfin en fond mais sur le côté deux salles de classes.

Nous nous retrouvions au patro certains soirs après l’école, le jeudi matin et après-midi, le dimanche matin après la messe de 9 heures et l’après-midi pour aller au cinéma. Le dimanche soir il y avait le salut où tous ceux qui avaient participé aux différentes activités se retrouvaient. Inutile de préciser que les sportifs étaient nos modèles et parmi eux il y avait René COURRIER qui représentait à nos yeux le « champion ». Après Pierre LAGARDERE il y avait notre seconde idole.

Nous avions un choix d’activités dans la cour ou sur le fronton, entre un grand jeu, une partie de foot, de basket de pelote et des jeux mis à notre disposition (échasses, foot de table tout en bois dont les joueurs étaient de gros tourillons et plus tard un ping-pong et un billard)

Pour s’occuper de nous dans la cour du patro il y avait Messieurs CAILLON , BROUSSE, DELILE et LAGARDERE , qui comme les trois mousquetaires étaient quatre, et avaient parfois bien du mal à nous garder ou à nous séparer quand il y avait des bagarres.

A ce jeu la palme revenait à BERARD-DULUC  qui se battaient très très souvent.

Le groupe qui s’occupait du cinéma était composé de CAZENAVE- CANTORNE – CLAIN… Ils étaient habillés d’une blouse blanche avec le coq de Pathé cinéma comme écusson

Au cinéma avec le groupe des anciens il y avait Mademoiselle MARGUERITE, qui vendait des sucettes et des bouchées au chocolat très savoureuses du moins avant les restrictions.

Je me souviens que Mr CAILLON, assis sur un banc, devant la salle de gym, ne se  déplaçait pas beaucoup. Il avait à la main une branche d’érable coupée des arbres qu’il y avait au fond de la cour et frappait nos jambes nues quand nous devions passer devant lui après avoir fait une bêtise. Mr BROUSSE  criait beaucoup. Messieurs LAGARDERE et DELILE étaient très gentils et bien moins présents que le père CAILLON que j’ai par la suite beaucoup estimé.

Comme directeur l’abbé FAUX venait d’être mobilisé et c’était l’abbé TEYNIE qui prenait sa place.

Il allait être, pour ceux de mon âge ,celui qui allait avoir une grande influence sur toute cette bande de jeunes que nous étions alors.

Le prêtre

En effet, le prêtre était un personnage très important au catéchisme où il était celui qui devait faire comprendre et expliquer les sens des paraboles, des mystères et tout le contenu évangélique. Au patro, il était celui qui parlait, qui dirigeait, qui expliquait, qui faisait prier, qui conseillait, qui guidait. Il était le refuge ou le recours.

Pour nous qui avions 10 ans quand il est arrivé, l’abbé TEYNIE a été tout cela, et pour moi qui avait perdu mon père à l’âge de trois ans, et sur la demande de ma mère, il a été encore plus et a beaucoup marqué mon adolescence. J’ai d’ailleurs toujours soutenu  depuis que c’était entre 10 et 14 ans que tout se jouait et que le patro était plus important que l’école au niveau de l’éducation et de la formation humaine.

Pour comprendre cela, il faut bien évidemment se situer à une époque imprégnée de principes et de valeurs distribuées par des leçons de morale à l’école primaire et par le catéchisme pour ceux qui croyaient.

La charité le partage, l’aide aux plus faibles, l’amour du prochain, le respect de l’autre, la référence aux commandements et à l’évangile avec des notions de fautes et de péchés, étaient les mots qui revenaient continuellement dans les discutions que nous avions avec le prêtre.

« Aimez-vous les uns les autres » «  nous sommes tous frères » «  tant que tu n’as pas tout donné, si tu n’as rien donné.. » Ces phrases que l’on trouvait dans les discours, mais aussi sur les murs ou sur des banderoles que nous confectionnions.

Durant nos années de catéchisme, comme celles qui ont suivi, la vie et le sacrifice du Christ était l’exemple et le modèle cité à nos consciences,  qu’il fallait souvent examiner. En  effet, faire notre examen de conscience, faire des sacrifices et beaucoup prier nous était beaucoup demandé. Faire un sacrifice et prier pour un camarade ou un parent malade ou en difficulté, pour ceux qui étaient prisonniers et pour d’autres et nombreuses raisons,  était courant.

Il faut dire qu’à cette époque la science et les docteurs , n ’avaient pas les mêmes pouvoirs qu’actuellement et la prière était très importante. C’était le recours à Dieu face à l’impossibilité humaine. Tout ceci explique un peu l’importance du prêtre et le « milieu » dans lequel nous allions faire nos premiers pas.

 

Les débuts

Nous voici en 1940 dans ce patro qui perdait quelques-uns de ses membres devenus militaires. Le plus gros de la troupe restait et tous pouvaient continuer à jouer au foot, basket. Pour nous tout allait commencer.

D’abord en spectateurs, le foot à CARMAUX , le basket et le cinéma allée des peupliers et puis par la suite en acteurs.

Acteurs, nous l‘étions le jeudi après-midi avec les cœurs vaillants et certains soirs dans la cour du patro où il y avait des petits matchs de foot ou de basket. C’est là que nous avons fait connaissance avec ces « grands » que nous devions embêtés très souvent.  Quelques-uns se vengeaient surtout au basket en faisant le tir et en nous passant le ballon que nous prenions en pleine figure. Ceci m’entraina à considérer que :

" L’apprentissage pour les sportifs que nous voulions être était plus rude et plus difficile qu’actuellement".

Il n’y avait qu’un seul ballon pour tous et il fallait se battre pour le posséder

Cette lutte éliminait passablement de monde et on  peut penser que ceux qui restaient avaient quelques possibilités.

Rien à voir avec maintenant, ou chacun peut pratiquer une activité physique et s’exprimer sur un terrain de sport. Aussi, bien que cette analyse se situe au premier niveau, et qu’il y a bien d’autres éléments qui ont motivés les choix, on peut penser, que ceux qui avaient des difficultés pour participer aux jeux des grands étaient pratiquement rejetés. Nous étions de ceux qui luttaient et qui allaient pratiquer…

Mais n’allons pas si vite et essayons d’envisager et de recréer le patro de cette époque et ses divers composants. Il semble, selon mon point de vue, que les différences sociales étaient plus évidentes et plus prononcées que de nos jours.

Ces différences se répercutaient à tous les niveaux et dans tous les domaines. A l’église, au patro, à l’école et même les quartiers avaient leurs particularités. Par exemple, dans l’église il y avait un banc en bois très travaillé qui était réservé aux notables. Les personnes qui à la messe se trouvaient sur ce banc représentaient pour nous les jeunes les « gens importants «  de la paroisse.

Nous avons déjà parlé des différences que l’on trouvait dans les écoles, avec une prédominance bourgeoise pour saint Augustin.

Au patro il y avait trois groupes que l’on peut schématiser ainsi

-          Le premier en nombre, les sportifs, qui étaient l’émanation dans la généralité du monde ouvrier

-          Le second avec ceux qui s’occupaient eu cinéma, du théâtre, ceux qui sont allés par la suite au scoutisme, étaient, dirons-nous, les intellectuels

-          Le troisième représentait cette classe de notables déjà décrite. Ils étaient enfants de chœur ou clercs

Il est évident que cette différence entrainant des rivalités mais d’avantage entre les groupes constitués qu’entre les personnes.

Par groupes constitués, j’entends ceux qui appartenaient au foot, au basket etc. Rivalités d’opinions aussi entre ceux qui allaient à la messe et les laïques. Rivalités entre les quartiers.

Il faut s’attarder, sur cette entité qu’était le quartier. Il était très important par le fait que chacun avait sa fête, ses personnalités, sa bande, son commissariat de police, ses bars.

Il était tout un univers auquel nous appartenions. Les déplacements se faisaient essentiellement en tramways quand nous allions sur bordeaux ou à pieds quand nous allions vers Arlac, Mérignac ou Caudéran. Se déplacer d’un quartier à l’autre représentait souvent pour nous l’aventure.

Nous vivions dans un périmètre relativement restreint. Nous nous connaissions tous, nos rapports étaient nombreux et conséquents. Nous étions ensembles à l’école, la rue était à nousle jeudi et dimanche, et la guerre avec le départ de beaucoup d’adultes, n’a fait qu’accentuer tout cela.

Pour donner un aperçu nous étions quelques-uns à habiter dans la rue des trois étoiles HUREAU, ALBERT, PARADOL, JACQUET, GARENNE et moi, plus les filles et d’autres qui n’appartenaient pas au patro. Notre rue était perpétuellement transformée en terrain de jeux. Piste d’athlétisme, sautoir en hauteur, jeu de quilles, foot bien entendu, hockey, plus tous les jeux de gosses et ceux que nous inventions. Pas ou très peu de circulation. Nous étions maitres des lieux et on peut penser au nombre de problèmes qu’il pouvait y avoir entre les carreaux cassés et les ballons crevés, mais ceci est une autre histoire.

Ce qui nous intéresse est de savoir qu’à travers toutes ces différences et ces rivalités nous nous retrouvions tous au patro qui devenait un formidable catalyseur. Tout ne s’effaçait pas d’un coup mais plus que notre appartenance à l’école, au quartier, à la bande, nous devenions membres des jeunes de saint augustin. Ces JSA que nos adversaires traduisaient par Jeunes Singes Apprivoisés.

Le dénominateur commun était la religion et ceci expliquait peut-être cela à savoir une certaine rigueur et parfois une intransigeance que nos ainés ont reçu davantage que nous. Il y avait ceux qui allaient à la messe et les autres .

La messe était obligatoire de même que la confession et ceux qui manquaient la messe ne pouvaient participer aux rencontres sportives. Le patro n’était  pas ouvert à tout le monde. Il y avait des clauses très strictes dans les statuts et les interdits. La guerre et les conséquences ont sans doute bouleversé tout cela et dans l’église comme dans le patro une évolution a commencé à se produire

Notre génération a connu, a participé, peut-être, et surtout à bénéficier de cette évolution, à travers notre premier directeur l’abbé TEYNIE et plus encore son remplaçant l’abbé LACHAUX, ancien prisonnier. L’intransigeance est devenue tolérance et la rigueur assouplissement.

Ceci termine le survol de l’environnement qui était alors le nôtre et dans lequel nous allions faire nos premiers pas d’adolescents.

C’est durant ces premières années 40-41-42 que nous allions connaitre un maximum de choses en un minimum de temps.

Première communion, première licence, premier départ des grands pour le STO, premier dirigeant, premières responsabilités.

LES CŒURS VAILLANTS

 Il y a d’abord eu ce patro du jeudi qui commençait le matin avec le cours de catéchisme, que nous manquions parfois pour aller nous amuser au Tondu ou à la gravière, sous l’autorité de l’Abbé et des dames du catéchisme. L’une d’elles s’occupait plus spécialement de notre groupe et sous des aspects sévères avait assurément beaucoup de patience. Elle s’appelait Mlle PIGANEAU.

Après le catéchisme nous jouions dans la cour et nos activités différées  selon que nous avions ou pas un ballon ou une balle.

Nous revenions très tôt l’après-midi et nous avions pour nous accueillir et s’occuper de nous, trois séminaristes : Jean HOAREAU, Jean et Maurice ANDRIEU. Comme « surveillants » l’inévitable Mr CAILLON aidé par Messieurs DELILE, LAGARDERE et parfois Mr BROUSSE.

Nous faisions partie du mouvement cœurs vaillants, dont nous avons déjà parlé, qui était très important  et où la majorité du patro participait.

Nous étions par équipes constituées par notre appartenance à telle ou telle école et chacune avait un patron : St Paul, St Jean, St Louis, Guynemer, Mermoz …et une devise.

Nous avions des fanions, des carnets de chants et quelques-uns d’entre nous portaient au tour du cou un foulard en V retenu par un nœud en cuir. Le patron de mon équipe était  BAYARD et notre devise «  sans reproches et sans peur ». Nous l’avions inversée pour une cause très simple.

Nous commencions par le rassemblement avec lecture de la prière des cœurs vaillants (voir document) et chaque chef d’équipe criait le nom de son patron et la première partie de la devise.

Les équipiers répondaient par la seconde partie et il était plus facile pour nous de dire «  sans reproches et sans »  avec la réponse « peur » que l’inverse.

Voici quelques devises

-          St jean  d’un seul… cœur

-          Vive le Christ … roi

-          Le sourire … toujours

-          Du cœur et du … cran

-          Tous … unis   Tous … frères

Il y en a beaucoup d’autres.

Nos activités étaient nombreuses et diverses. Des grands jeux dans la cour du patro, des préparations de « scénettes » se rapportant à la vie du patron de l’équipe, des sorties à pieds qui nous menaient parfois très loin. Nous allions à la page blanche Carnaux, au champ de manœuvre, à Gradignan etc.

Nous marchions beaucoup et chantions énormément. Nous avions aussi passablement de discussions avec l’abbé ou nos séminaristes, par équipe ou au cours de promenades ou en rentrant le soir.

Je me souviens très bien de ces longues marches en chantant et de ces discussions ou l’on faisait « l’examen » de ce que nous avions fait. C’est au cours de l’une d’elle où j’étais en désaccord avec eux que j’ai, sans doute, pris conscience de certaines choses.

En effet, je jouais pour gagner quel que soit le jeu, et je n’ai jamais changé depuis. Pour nos éducateurs la victoire ou la défaite n’étaient pas une chose importante les interrogeaient et me demandaient pourquoi je mettais tant de hargne et de combativité dans le jeu. Je ne sais qu’elle a été ma réponse d’alors, mais je sais par contre que le jeu et le sport plus précisément ont toujours été pour moi quelque chose de sérieux et d’important qui m’ont permis de m’exprimer.

Avec le recul du temps, il semble que beaucoup aient été influencés par cette conception du jeu et du sport ou l’essentiel était de participer.

Durant de nombreuses années, j’ai entendu prononcer par de nombreux dirigeants que ceux qui jouaient pour gagner avaient la « championité ». Cela a toujours  eu le don de m’agacer profondément.

LES REVELATEURS.

Le jeu, l’équipe, le chant en commun, l’effort, la discussion, la devise, la victoire, le commandement.

De toutes ces choses que j’avais sans doute en moi, les cœurs vaillants ont été le premier révélateur et c’est avec ce contenu que je suis passé, avec d’autres, des cœurs vaillants au basket.

Second révélateur, l’école. De ce groupe de jeunes que nous étions à avoir eu une passion sportive, un grand nombre appartenait à cette école de la glacière.

C’est au début de la guerre que cette école fut déplacée au château Piganeau ou se trouve actuellement l’école normale. Cette très belle propriété entourée de terrains vagues ne favorisait pas, on s’en doute, les études. De plus nos maîtres changeaient souvent, très et trop souvent, et l’activité physique tenait un grand rôle.

Entre les exercices d’alerte et les parties de foot que nous faisions sur les terrains face à l’école ou la gendarmerie de la rue Séguineau  en ajoutant  les « coques » que nous faisions assez souvent, il restait peu de temps pour le travail scolaire.

C’est à cette époque qu’un de nos instituteurs Mr BAREAU nous a mis en contact avec l’un des frères PAREAU, instituteur lui aussi ; et par la même, membre des JSA, qui a été notre premier entraineur de basket à la maison communale, mais cela a été très court.

Puis l’école a de nouveau changé d’adresse et nous avons été dans une autre propriété «  CASTELMEZAN » bien plus petite en bas de la rue d’Epernon ou se trouve actuellement la sécurité sociale.

Dans le parc nous avions fait un sautoir, une piste pour poursuivre cette passion qui nous poursuivait sans interruption. De cette génération et de cette école sont sortis quelques champions, de lutte comme Roger BIELLE( trois Olympias), d’athlétisme René PARADOL, athlétisme et basket Claude LAURENT, boxeur comme RUCHAUD qui avait tendance à commencer son rôle de boxeur avec son maître d’école, un bon nombre de footballeurs et de basketteurs et aussi quelques gangsters notoires comme BELIER et BOUCLETE.

Situer le milieu dans lequel nous vivions, situer ces années d’occupation ou le manque d’adultes, le manque d’instituteurs et de rigueur dans cette école ou nous faisions des « coques » monstres, pouvait donner l’occasion de faire n’importe quoi, permet de mieux comprendre toute l’importance qu’a eu le patro sur nous.

Nous avons été influencés par le prêtre, les séminaristes, c’est indéniable, mais je voudrais ajouter à ceci, tous les grands que nous avons côtoyés, que nous avons entendu discuter, avec lesquels nous jouions et dont certains nous ont servis d’exemple.

Nous aurions pu devenir comme pas mal de nos copains des voyous et s’il est vrai que l’abbé TENYE a su nous parler, nous comprendre et nous convaincre, il est vrai aussi que les jeunes ont besoin d’idoles et nous avons trouvé les nôtres, nos premiers  modèles au patro parmi, plus particulièrement, les sportifs

Il y avait les frères HOAREAU dont l’un André jouait au foot avait un très bon tir. Il disait « POM » à chaque shoot. L’autre, Jean, séminariste, nous l’avons déjà dit, quittait aussi sa soutane pour jouer au foot le dimanche. Les frères SEI qui jouaient alternativement au foot et au basket et dont l’un Jean parlait souvent avec nous et nous a fait nos premières leçons … sentimentales.

La famille des NAUD dont l’ainé jouait au foot et très bien de la pelote basque, les frères LIMA, LACAMPAGNE, DUCOURNEAU, JUSIDOU, RIVIERE dont la spécialité était de tirer au basket après être passé sous le panier. GOMBAUD, LASCAZE qui a son retour s’est aussi occupé de nous et qui voulait toujours que l’on fasse de l’athlétisme, les footballeurs GUICHENEY- GOUTILLE- JOURDAN- RIEU- PRADES – SOUBERVIE et bien d’autres.- Roger  DUCOS qui au cours d’un match de foot dans la cour  et sans doute après une entrave faite par ALBERT a dit à celui-ci : et si je te flanquais une gifle petit… Réponse de Bébert qui lui arrivait à la ceinture : tu crois que je lirais le journal ?

Parmi eux il y en avait un qui était à nos yeux le plus fort. C’était le capitaine de l’équipe de foot René COURRIER qui quand il nous disait : voilà le tandem BARBIER, PARADOL et appelait souvent l’un pour l’autre. Il était d’une très grande gentillesse avec nous et j’ai été très heureux de le retrouver de longues années plus tard à Paris, où il travaillait, lors d’un match de basket contre le PUC. Ceux-là étaient les sportifs, mais il y avait aussi les autres, ceux qui s’occupaient du ciné et du théâtre et dont l’un André CAZENAVE qui, aux répétitions,  ou certains soirs, jouait merveilleusement bien du piano. Nous étions tous autour de lui pour l’écouter. Il a dirigé plus tard un grand orchestre et a été plus connu sous le nom de Norman MAINE. C’est lui qui jouait de l’harmonium à la messe c’est FRONDEL qui faisait chanter. Il a lui aussi été pour nous le meilleur.

DEBUTS SPORTIFS

C’est en 1940 que Mr GOUTILLE nous a demandé de signer notre première licence de basket. Nous étions plusieurs cœurs vaillants mais cette fois dans une même équipe, ceux de la glacière (PARADOL, ALBERT, BARBIER, JACQUET, BARANDIERAN et d’autres) et ceux de st Augustin : GALBAN-LEYLE-FROTTE- DEDIEU- LASSERRE.

Je crois que Guy DEDIEU a été notre premier capitaine. Nous avons déjà cité les séniors : LACAMPAGNE-JUSIDOU-TACHOIRES- Gaston LUMA, GOMBAUT … et les juniors ou cadets s’appelaient GALBAN-LAPEYRE-BROUSSE-LEGLISE-STMARC-PAREAU- RIVIERE DELAUX.

Nos premiers maillots ont été des chemisettes blanches avec comme écusson cousu dessus un cœur avec les initiales J.S.A. brodés par Mademoiselle MARGUERITE. Les chaussures de la marque « l’aigle » et nous avions sur nos flottants une ceinture de gym aux couleurs jaune et noir. Je ne sais si cette ceinture représentait le sommet de l’équipe mais je me souviens de la joie que j’ai eu à l’achat de la mienne chez Bernard rue Ste Catherine.

Le ballon en cuir découpé en quartier dont la fermeture s’effectuait avec un lacet en cuir lui aussi. Il fallait tout un matériel et s’occuper du ballon était un art.

Il devenait très mou et glissant quand il pleuvait et très sec et  dur quand il faisait froid. Il fallait souvent changer l’un des quartiers ou le recoudre et c’était Mr GRENIE, fabricant rue du Bourdillot, qui se chargeait de l’opération. A noter que, pendant l’occupation où le cuir comme le reste était rationné, ce monsieur nous a souvent dépannés. Il a toujours été avec nous très accommodant.

Le terrain n’était pas encore éclairé et les seuls entrainements que  nous avions étaient le jeudi après-midi, après les cœurs vaillants et le dimanche matin après la messe de 9 heures où grands et petits se disputaient la cour. Je ne sais, non plus, si les matchs étaient nombreux et je ne me souviens que de quelques-uns. Peut-être était-ce le premier contre St Bruno ou les Coqs Rouges où nous avions encaissé 60 à 2 ou à 0, mais je suis certain qu’il n’y a jamais eu après de défaites aussi lourdes et très vite au contraire nous allions avoir de bons résultats.

Notre premier dirigeant fut Jean DESCLAUT qui passa rapidement, pour cause de départ, le relais à André BUREAU.

Nous venions de constituer « l’équipe », première synthèse entre les groupes, premier rassembleur et nous allions parcourir par la suite un long chemin.

Aussi on peut dire que du groupe important que nous étions au départ, il en est ressorti :

-          Une partie, qui avait l’esprit combatif, un peu ou beaucoup d’agressivité et quelques qualités physiques, s’est dirigée vers le sport

-          Une partie qui avait l’esprit groupe, qui a commencé le sport avec nous, mais qui n’avait pas les qualités nécessaires, c’est dirigée vers le scoutisme.

-          Enfin la troisième, composée de ceux qui n’avaient aucune attirance pour les activités physiques, c’est dirigée vers le théâtre, les enfants de chœur, les cercles d’études.

C’est vers le scoutisme que notre dirigeant André BUREAU s’est dirigé amenant avec lui Guy DEDIEU Max MAZERA et bien d’autres. Leur premier local fut construit sur le côté du cinéma et il y avait parfois des oppositions entre les scouts et les sportifs.

Il me semble que c’est à cette période 40-41 que les clubs,  par ordre gouvernemental, se sont regroupés sur les appellations : bordeaux nord, bordeaux sud, bordeaux est, bordeaux ouest.

Nous étions ces derniers avec un autre patronage d’Arlac de la rue Mouneyra  qui avait une propriété  La Garenne où nous allions passer le brevet sportif populaire. Une autre gloire, Victor SILLON, le premier perchiste français à 4 mètres faisait partie du patro.

Nous élargissions le cercle de nos connaissances et avions des contacts relativement fréquents entre plusieurs Patro et par le mouvement «  cœurs vaillants »et par le sport. N’oublions pas les colonies de vacances, et nous y reviendrons, où pendant deux années au moins nous avons participé en commun.

Ceci pour dire qu’encore de nos jours, nous retrouvons passablement de dirigeants de  mouvements sportifs formés à cette époque. Mais il faut dire aussi que comme les patros beaucoup ont abandonné. Il  serait intéressant d’en connaitre les causes car il est dommage de constater que de tous ceux qui ont disparu nous n’en saurons jamais rien. Il y aurait pourtant tellement de choses à raconter….

Revenons à St Augustin pour nous retrouver à l’église, à la messe de 9 heures du Dimanche où les enfants du catéchisme se tenaient à gauche aux premiers rangs de la nef centrale et les grands du patro à droite. Il nous tarder de passer notre première communion pour changer de côté. Nous chantions beaucoup et recommencions le dimanche soir où il y avait, après les rencontres sportives, le salut au saint sacrement. Nous nous retrouvions petits et grands dans cette salle derrière la scène pour de nouveau prier et chanter ensemble en français ou en latin. Le titre des cantiques était marqué à la craie sur un petit tableau noir accroché au mur. Nous chantions, là encore, beaucoup et comparativement aux cantiques de maintenant de nombreux étaient adressés à la vierge Marie. L’œcuménisme est arrivé depuis…

Et il en a été ainsi jusqu’en 1942 où les départs du patro furent nombreux avec les causes diverses mais dont la plus  importante fur le service du travail obligatoire en Allemagne.

L’OCCUPATION

C’est durant une partie de 42, l’année 43 et une partie de 44 où se situent les retours, que nous allons sous la conduite de notre directeur prendre conscience du patro dans sa globalité et pas seulement à travers l’équipe.

Combien étions-nous ? S’il est impossible d’avancer un chiffre, on peut dire avec certitude que nous étions peu nombreux. En effet, aux départs des adultes se sont ajoutés ceux des moyens comme LEGLISE, BROUSSE, LAPEYRE de partir jouer dans d’autres clubs et plus précisément au BEC je crois !

Quand nous revenions de notre match le dimanche après-midi, nous nous enfermions dans le bureau avec l’abbé qui nous payait une tarte achetée chez CELER avec parfois une bouteille de mousseux.

C’était la fête et nous discutions beaucoup et c’est sans doute au cours d’une de ces discussions que nous avions décidé, devant le manque d’adultes, de prendre parmi nous les membres du bureau de la section. Nous nous trouvions dans l’obligation de nous prendre en charge.

Le sport, la compétition étaient notre but et nous cherchions nous même nos adversaires. Le jeudi après-midi on jouait au foot à Caudéran avec la Jeanne d’Arc, à BOURAN, à CARMAUX et souvent entre nous contre ceux d’une autre école quand il n’y avait pas d’autres adversaires.

On revenait ensuite au patro pour jouer au basket ou à la pelote basque. Il y  avait aussi un ping-pong, un billard et des foots de table.

Le dimanche matin où il y avait match on préparait le terrain pour l’après-midi. Nos adversaires étaient CHANTECLER, L’UNION ST JEAN, ARLAC, ST BRUNO, L’ALLIANCE TALENCAISE, les COQS ROUGES et d’autres. Les patros étaient nombreux et tous forts.

Notre terrain, comme d’ailleurs presque tous, était en terre et quand il pleuvait ce n’était pas la joie. Le nôtre avait la particularité d’être en pente et de garder l’eau Il y avait un grand nombre de puisards dans la cour et Mr BROUSSE en était le spécialiste. On a tout essayé, de la  grave, du sable, du mâchefer. On balayait souvent, bien entendu , et pour premiers progrès, les lignes ont été faites en ciment. Quand ? On traçait aussi le terrain de foot à CARNAUX et il prenait le nécessaire chez Robert DUCHEIN. Quoi ? Enfin, ceci pour dire que nous avons commencé à travailler très jeunes dans ce patro et là encore ceci n’a été qu’un début.

Notre premier entraineur fut Mr PARAU, instituteur, frère d’un joueur de basket plus âgé que nous. Nous aillions à la salle de la rue Chauffour- maison communale où il y avait plusieurs paniers, un fronton, et une salle de gym où nous allions de temps à autre. Cela ne dura que peu de temps et dans ce domaine de l’entrainement nous avons appris aussi à nous débrouiller entre nous.

Nous allions à la maison communale en tramway et revenions le plus souvent à pieds car après 22 heures il n’y avait plus de tramway. On s’amusait beaucoup et le rire était continuellement présent, une bande de garçons dissipés mais avec le sourire… toujours. Nous étions très joyeux.

On faisait souvent n’importe quoi. Dans la période  sans compétition, on restait des dimanche après-midi entiers chez Mme DELAUX à jouer aux cartes avec les filles qui regardaient et qui devaient profondément s’ennuyer. Inutile de préciser  que nous passions l’après-midi sans consommer. Nous étions chez nous dans ce café qui a toujours été plus que l’annexe des JSA car pour beaucoup je suis certain que le patro c’était aussi chez DELAUX.

Nous allions aussi en ville, au cinéma où on essayait de rentrer sans payer. On connaissait certaines combines, en particulier au COMEAC- rue st Catherine où l’on pouvait pénétrer dans la salle en passant par les WC, situés dans une petite impasse derrière le cinéma.

Dans cette période difficile, non seulement nous n’avions pas d’argent, mais il manquait bien des choses.

Nos belles chaussures du début étaient depuis longtemps usées et nous étions contraints de jouer avec n’importe quoi pourvu qu’il n’y ait pas de talon : espadrilles, bains de mer, regum etc.. Tout y passer.

Restrictions aussi dans la nourriture et nous escaladions de temps à autre  le mur derrière la cour pour aller dans la remise du pâtissier CELER, accompagné de son fils Roger, le diable, pour voler des pruneaux secs dont il faisait les « fameuses » tartes que nous mangions le dimanche.

La «  pique » aux fruits a aussi fait partie de nos activités coupables et c’est peut-être dans ce domaine, à cette période, que nous avons accomplis nos plus beaux exploits.

Pénétrations par effraction ou pas escalades dans quelques jardins avoisinants et certains ont été amenés devant Mr le Gendarme de service à St Augustin ou à la Glacière. Mais cela n’allait pas plus loin. Car c’était bien souvent excusable à défaut d’être permis.

Sur ce sujet, il me revient à l’esprit cette colonie au collège de BAZAS en 1942 où plusieurs patros s’étaient réunis pour organiser nos vacances, notre colo de Gujan comme beaucoup d’autres ayant été séquestrée par les Allemands : zone occupée, zone libre, la ligne de démarcation, tout cela nous incitait sans doute à jouer les contrebandiers. Il faut dire que l’ordinaire était très léger et je crois bien que nous avions à peu près tous les jours de la soupe aux choux très légère en consistance… on avait faim.

A chaque sortie journalière du collège, on quittait BAZAS avec discipline, en rang ou en file indienne en chantant entre autre «  Maréchal nous voilà, et dès les premiers chants certains se détachaient pour aller cueillir quelques fruits. Des « piques » énormes où parfois l’un de nous se faisait prendre, ce qui était arrivé à Pierrot LASSERRE qui doit encore s’en souvenir…

Nous avions aussi poursuivi dans cette colo notre initiation sportive. Nous faisions beaucoup de sport : foot gymnastique, pelote basque et nous avions pris goût à l’athlétisme que nous avons continué de pratiquer, de temps en temps seulement au C.A. Municipal, où était licencié René PARADOL avec Mr DUSSARAT. Cela nous a servi puisque nous avons fait par la suite des championnats inter patros et divers challenges.

Un peu d’athlétisme, un peu de foot, un peu de pelote, mais c’est surtout le basket qui a retenu toute notre attention. Le reste se faisait en supplément et cela s’est aggravé quand Mr LEYLE, père de Jeannot et Pierrot, est venu à notre secours.

Après les pionniers, après l’auto gestion, le basket allait trouver en lui son premier patron.

Petit en taille, mais grand dirigeant, organisé et méthodique (métier comptable) ; il allait faire du groupe turbulent, le mot est faible, que nous étions une équipe solide et solidaire, et de la section de basket une structure importante au sein du patro.*

Quelques années plus tard le basket allait d’ailleurs obtenir son premier titre de gloire.

Avec lui, nous allions non seulement progresser dans notre sport, mais vivre intensément le groupe autant que l’équipe.

Prise en charge totale, et nous étions pour Mr et Mme LEYLE leurs enfants au même titre que Pierre, Pierrette, Jean ou  Josette. Encore maintenant, Madame LEYLE dit : «  mon fils » quand elle s’adresse à l’un d’entre nous.

Après le départ de l’abbé TEYNIE et la venue de l’abbé LACHAUX, le patro être moins souvent ouvert et nous allions chercher les clés à la cure.

Nous avons déjà dit que nous allions aussi chez DELAUX. Je crois qu’à cette période que si Mr LEYLE n’était pas venu s’occuper de nous, nous aurions fait comme d’autres et serions partis ailleurs. C’est chez les LEYLE que nous nous sommes retrouvés, que nous avons pris conscience de notre amitié, que nous avons fait nos premiers projets sérieux.*Nous nous retrouvions  pour manger des merveilles ou des crêpes et boire du vin blanc, pour fêter tel ou tel événement, pour passer des soirées.

En cette période où les restrictions sévissaient toujours, cela était très important, mais nous allions surtout construire une équipe qui allait vivre de nombreuses années ensembles, dans un esprit de camaraderie et d’amitiés très puissant. GRANGE, GALBAN, LEYLE, SOUQUET, FROTTE, BARBIER, des plus jeunes, MERCIER, ALBERT, d’autres BERARD, PARADOLE, ceux qui ont fait un passage, PRAT, RUFFAT, CHARLES et nos plus fidèles supporters LEYLE Roger neveu de Mr LEYLE et Riquet MEILLON.

Temps aussi de nos premiers flirts où les occasions de faire connaissance avec les filles n’étaient pas si fréquentes. L’une de ces occasions était le mois de Marie où tous les soirs après l’office nous allions raccompagner l’une ou l’autre de ces demoiselles. Nous étions parfois plusieurs garçons pour une seule fille. Cela arrivait souvent car ces filles étaient beaucoup plus tenues que nous et il y avait dans ce domaine aussi compétition… Quelques-uns du groupe ont connu alors leur future épouse.

Le patro, lui aussi, changeait de corps. Des salles furent construites à la place de la salle de gym et de l’ancienne salle de réunion où se tenait le bureau de l’abbé.

Celle qui a pris la place de la salle de gym avait deux pièces dont l’une, la plus grand, allait devenir, plus tard, notre premier foyer-bar et l’autre servait de salle de réunion et de vestiaire.

Pour les douches nous avions toujours le robinet dans la cour a côté du fronton. Le billard avait été transporté dans la salle de cinéma- il y avait-il du cinéma ? Et la salle de derrière servait au catéchisme avec une chapelle et le bureau de l’abbé avec une porte sur l’extérieur.

Nous allions effectuer un second séjour commun avec plusieurs patros à la colonie des coqs rouges, à LATESTE où l’abbé GRENIER nous racontait à la visite les histoires de Pibastes et où les confessions de l’abbé GUILGAU n’en finissaient pas … Ce saint homme, dont tous les coqs se rappellent devait passer une bonne partie de chaque jour  à confesser a cette colo. Ce n’était plus la pique aux fruits, mais la pêche aux crabes où nous allions sous les rochers de la Hume avec de grands sacs. Plus ou moins de choux comme à Bazas, mais du poisson. Claude BOLZEC, l’actuel entraineur de la section natation était alors un personnage aux coqs comme à la colo et avec lui il y en avait bien d’autres… un grand nombre assurément puisque dans le grand réfectoire et y avait une scène où pendant le repas plusieurs s’exprimaient. Nous avons appris beaucoup de chansons à LA TESTE.

Au retour une nouvelle saison sportive allait commencer  pour les JSA et puis nous avons eu en 1944 les premiers retours et une confirmation celle de Barthelemy CHIAMA parmi les grands. J’allais quitter l’école pour commencer mon apprentissage d’ébéniste. J’avais 13 ans ½. Nous avons été plusieurs à choisir le bois, mais il y avait-il le choix ? Dans le groupe BERARD, SOUQUET, LASSERRE ALBERT eux aussi allaient devenir ébénistes Si j’ai nommé plus spécialement  mimi CHIANA, c’est qu’il a été le maillon entre les différents groupes. Il a été à nos yeux la synthèse de l’intellectuel et du sportif. Il avait bien des cordes à son arc, pouvait discuter sans fin sur n’importe quel sujet et être aussi un  brillant footballeur. Il était aussi avec ses frères Lucien et François, clerc et son père officier allait devenir plus tard le Président du patro.

Un document faisant part d’une réunion de bureau du 21 décembre 1944 fait appel aux parents en ces termes «  le devoir de chacun est d’aimer le patro par tous les moyens de son pouvoir ». Il annonçait la création de nouvelles équipes sportives, d’un groupe artistique, d’un cercle d’études avec le nom des responsables.

                René COURRIER pour le foot

                Jean DESCLAUT pour le basket

               André CAZENAVE pour le groupe artistique

                BARTHELEMY  pour le cercle d’études

Le patro s’organisait. Le patro repartait.

Sans doute au niveau des séniors, tous jouaient indifféremment au foot ou au basket ; il en a d’ailleurs été ainsi pendant plusieurs années, car on trouve sur les photos de cette époque bon nombre de basketteurs dans l’équipe de foot. Les frères SEI, GALBAN P, LIMA, RIVIERE, TACHOIRES, PRADES, avec VIGIER, VIC LUMA N., DUCOS, LANIS, JOURDAN, CHIANA, DAVIAU- BARDOU …

Quant à notre groupe il continuait. Nous étions minimes et Mr LEYLE nous avait engagés en coupe nationale des patros. Comment Mr LEYLE s’est-il arrangé ? Toujours est-il qu’en plein restriction nous avons eu toute l’équipe de magnifiques chaussures montantes qui ressemblaient à celles de boxeurs et nous avons été sûrement les premiers basketteurs à utiliser des chaussures confectionnées entièrement avec du cuir. Les Busnel sont arrivées bien après.

Nous avons effectué notre premier déplacement  dans les Landes à CAUPENNE  ou nous avons encaissé un 38 à 8 de bonne mémoire. Les supporters landais nous disaient en partant : «  as-tu vu passer le ballon ? »  Pour sûr que nous l’avions vu passer dans nos filets.

C’était  le premier contact avec les landes et il y en a eu bien d’autres et aussi savoureux depuis. Sur le plan départemental, nous allions en finale contre l’union St Jean au stade municipal que nous n’arrivions pas à battre.

Nous avions pourtant notre équipe renforcée par André PRAT qui a été par la suite un très bon joueur de rugby au CA Béglais. Il venait des Girondins ASP qui avaient leur siège au café Walton, attenant au café DELAUX. Un des principaux joueur et dirigeant des girondins était Pierre LEYLE, le fils ainé de Mr LEYLE.

Ils avaient leur terrain – basket et tennis- rue maitre Jean à la place du gymnase actuel.

Que peut-on dire de ce « cousinage », si ce n’est qu’il y avait davantage de différences que de rivalités.

Différences entre les cafés et leurs clientèles. Différences entre les mentalités. Le patro était catholique, les girondins laïques, mais je ne me souviens pas avoir connu de confits entre les deux clubs bien au contraire.

La famille PRADES était aux Girondins «et Gilbert PRADES a joué aux deux clubs. Il y avait Mr LACROIX, arbitre très renommé, dont le fils Philippe a été un très bon basketteur et un de nos fidèles supporter dans les dernières années de sa vie. Notre équipe allait souvent s’entrainer ou jouer sur leur terrain et je me souviens de mon premier coup de pied aux fesses donné par GARNIER sans doute après une entrave de ma part au joueur des Girondins.

Nous avions plus que du caractère. Nous étions sans gêne et irrespectueux. Quand nous étions dans le tramway nous chantions des chansons de corps de garde et Mr LEYLE faisait comme s’il n’était pas avec nous.

Nous changions continuellement de capitaine de l’équipe, car les personnalités étaient si fortes qu’il fallait un roulement. Je crois bien avoir été la plus râleur… mais nous nous entendions bien malgré tous nos défauts.

Et puis la libération est arrivée. Au cours de ces journées nous avons parcouru de nombreux kilomètres à pieds pour aller d’un château  à une propriété où les derniers allemands distribuaient du tabac en paquet, du pain parfois. Il y a avait aussi le pillage surtout des trains et nous avons été à Ravesy où les allemands d’une part se battaient entre eux et d’autre part tiraient sur les français qui  essayaient de piller les trains. C’est là que j’ai vu pour la première fois un homme mort.

Les journées de la libération où nous avons été, avec les vrais et les faux résistants, et ceci dès le matin, rechercher « les femmes » qui avaient collaboré. Tondues sans autre forme de procès, je dois dire que cela a toujours été pour moi un très mauvais souvenir. J’ai appris ce jour-là que la « foule » était capable de faire n’importe quoi et je me suis toujours méfié depuis du jugement collectif.

Nous avons été l’après-midi à la cathédrale où ça tirer toujours avec des miliciens, puis aux allées de Tourny où défilaient les « vrais » résistants en tenue de l’armée française.

Parmi eux André BERNARD, oncle de Riquet MEILLON, qui a joué par la suite au foot au patro.

Et puis, le soir il y a eu la fête, et nous nous sommes retrouvés, bien évidemment chez DELAUX ou en fait de café nous avons bu et chanter, ceux du patro et les autres.

Peines aussi avec la mort d’un jeune résistant des JSA, LARTIGAU, se tuant lui-même accidentellement avec son fusil.

Les cloches, les fêtes foraines, les bals publics, beaucoup d’animations et de bruits, de règlements de comptes aussi… que le patro, à ma connaissance, n’a heureusement pas connu. Même s’il perdait quelques-uns, très peu, de ses membres. L’élan de solidarité d’alors a prévalu et bien des rapprochements, avec ceux qui nous ignoraient, se sont opérés.

Ce mélange, avec ceux qui revenaient, avaient soufferts et avaient besoin de se retrouver, avec ceux qui avaient une formidable envie de vivre et de s’amuser avec nous les jeunes, qui étions presque devenus, par la force des choses, des adultes, a apporté des changements.

Changements dans les mentalités où il semble que les contraintes, la rigueur, l’obéissance, a des principes strictes, aient été discutés voir remis en cause. L’église, le prêtre n’ont, sans doute, plus été perçus de la même façon. Les discussions que nous avions au cours des réunions étaient plus contestataires.

Changements dans les comportements ou la valeur de l’engagement n’était pas toujours respecté, ou les grands ou l’ancien n’avaient plus la même autorité.

Le patro, après cette période de 5 années difficiles était devenu différent.

Les « moyens » : LEGLISE- LAPEYRE-RECURT etc., eux aussi de retour aux JSA, étaient devenus grands et avec ceux du foot, de même âge, ou presque : BERARD- DAVIAU- LANIS- GALBAN P… allaient prendre une part importante dans le renouveau du patro.

Ce patro qui à la fin de ces 5 années, toujours sous la direction de l’abbé LACHAUX, ancien prisonnier devenu résistant, était autant chez DELAUX qu’au 12 allée des peupliers, et n’en veut pour preuve que ce premier réveillon d’après-guerre qui s’est fait chez DELAUX.

Puis quelques mois après, nous avons été installés l’abbé LACHAUX, qui devenait curé de St Quentin de Caplon, sans doute une des première grande sortie en car du patro, dont tous ceux qui ont participé se souviennent.

Et c’est en 1946 que nous avons accueilli l’abbé d ‘Have, notre nouveau directeur.

CONCLUSION 39-45

Que conclure de cette période étalée sur 5 ans avec des événements importants qui fatalement laisseraient des traces dans les cœurs comme dans les esprits.

De ce patro, que nous avions connu au départ rigoriste pour tous, grands, moyens, petits, puisque telles étaient  les classifications d’alors pour devenir J1, J2, J3 par la suite, il semble que l’église est par conséquent les prêtres, allaient devenir moins intransigeants.

La messe, comme la communion mensuelle, n’allaient plus être obligatoires et le patro allait s’ouvrir d’avantage sur l’extérieur.

Le prêtre n’allait plus avoir toute puissance et quelques laïques allaient prendre des responsabilités :

-          Au niveau des différences, des contacts établis à l’armée , dans les camps, entre les croyants, et les non croyants leur ont permis de se connaitre et même, pour beaucoup de se comprendre.

Au patro, les cloisons entre les classes sociales sont apparues moins évidentes et les rapports entre individus plus amicaux.

Les différences s’atténuant cela n’a quand même pas empêché les rivalités, école-patro, ou entre les divers groupes. Mais l’agressivité avait disparue. On était d’un côté ou de l’autre mais on se parlait.

La liberté devenait réalité et chacun pouvait parler, s’exprimait, dire ce qu’il pensait. Sans doute, cela à entrainer la contestation , et les discutions avec le prêtre, notamment, ont été plus ouvertes, plus franches.

On pouvait aussi rire, chanter, s’amuser ouvertement, et les fêtes, les bals devenaient les nouveaux lieux de rencontre. On se retrouvait tous, filles et garçons, a toutes ces manifestations. On retrouvait, aussi, le patro joyeux des premières années où grands, moyens et petits pouvaient de nouveau vivre ensemble.

Mais ce climat de liberté et d’amusement allait faire que le patro était autant chez DELAUX qu’a l’allée des peupliers. Les principes, la rigueur, l’importance du prêtre de nos débuts, n’allait être perçue de la même façon, et cela rejaillissait sur les comportements.

Le patro n’était plus un bloc, mais s’éparpillait

L’apprentissage sportif que nous avons connu dans cette dispute du ballon avec les grands, les rivalités parfois agressives d’alors  qui entrainaient la lutte, le désir de vaincre, tentaient à disparaitre et dans cet environnement plus gentil, plus facile, qui s’ouvrait sur tout notre groupe allait seul prendre le sport au sérieux et par la même,  sans doute aussi, de se prendre au sérieux. C’est du moins l’opinion qu’avaient de nous certains adultes.

 

La

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